Le Pays Quint - Kintoa fut longtemps le théâtre de violents conflits entre bergers français de Baïgorry et espagnols de la vallée d’Erro. Jusqu’au début du XVIIIe siècle, ce territoire, plus vaste qu’aujourd’hui, englobait les terres des Aldudes, de Banca et d’Urepel, alors inhabitées et non délimitées. Selon la tradition basque, les biens familiaux étant transmis à l’aîné, de nombreux cadets de Baïgorry vinrent s’installer sur ces terres qu’ils défrichèrent peu à peu.
Pour mettre fin aux tensions persistantes, le traité de Bayonne, signé le 2 décembre 1856, fixa les modalités de partage de cette zone disputée, ainsi que son régime d’utilisation. Malgré cela, le Pays Quint conserve encore aujourd’hui un statut hybride : bien qu’il se trouve en territoire espagnol, la poste française y distribue le courrier, Enedis y fournit l’électricité, tandis que la sécurité est assurée par la Guardia Civil. L’administration de la zone relève, quant à elle, de la commune d’Urepel et du département des Pyrénées-Atlantiques.
L’historien Paul Raymond avance que le nom Quint viendrait du "droit du quint", une ancienne taxe prélevée sur les porcs qui se nourrissaient des glands abondants dans la région.
Fait étonnant, le Pays Quint – ou Kintoa en basque – ne fut pas mentionné dans le traité des Pyrénées, qui définissait la frontière franco-espagnole selon la ligne de partage des eaux. Il resta donc une propriété indivise entre les vallées d’Erro, de Baztan et de Baigorri. Pour régler les différends majeurs, des commissaires des deux royaumes se réunissaient sur le pont d’Arnéguy, en terrain neutre. Une petite maison en bois à deux portes fut même érigée au centre du pont pour accueillir ces rencontres diplomatiques.
L’indivision prit officiellement fin le 27 août 1785, grâce au traité d’Elizondo, qui traça une nouvelle frontière connue sous le nom de "ligne d’Ornano", du nom du représentant français. Selon la légende, ce dernier aurait un peu trop abusé du clarete (un vin local) pour établir une frontière aussi contestée.
Cette ligne fut finalement entérinée le 2 décembre 1856 par un accord entre Napoléon III et la reine Isabelle II d’Espagne. Le traité confirma le partage du Pays Quint : la partie sud fut attribuée à l’Espagne, tandis que la France conserva des droits d’usage sur la vallée des Aldudes, notamment pour le pâturage, en échange d’une rente annuelle.
Au début du XXIe siècle, sept familles françaises résident sur ce territoire espagnol. Elles ont vu l’arrivée de l’électricité en 1979 et du téléphone en 1983. Leur situation reste singulière : elles paient leurs impôts fonciers en Espagne, mais s’acquittent de la taxe d’habitation en France, envoient leurs enfants dans des écoles françaises et bénéficient des prestations sociales françaises. Les troupeaux français qui traversent le Pays Quint pour la transhumance sont marqués du sigle V.E. (vallée d’Erro). Ce territoire, composé de pâturages et de forêts, s’étend sur une largeur variant de deux à six kilomètres et couvre une superficie de 2 510 hectares, soit 25,1 km².
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